La compassion au cœur de la réparation

Le processus de guérison est encore entouré de beaucoup de mystère, malgré les avancées de la science et de la médecine allopathique. Il apparait néanmoins de plus en plus que la relation, la connexion et la chaleur humaine ne serait pas si indissociable des pronostics, des guérisons, des réparations des maux physiques et psychiques des patients, malades, déséquilibrés, déstabilisés ou simplement décentrés.

C’est à travers l’écoute de mon livre audio du moment (« Clinical Applications of the Polyvagal Theory : The Emergence of Polyvagal-Informed Therapies » de Stephen W. Porges and Deb Dana) que j’ai découvert un poème qui a particulièrement résonné en moi.

Le processus de guérison est encore entouré de beaucoup de mystère, malgré les avancées de la science et de la médecine allopathique. Il apparait néanmoins de plus en plus que la relation, la connexion et la chaleur humaine ne serait pas si indissociable des pronostics, des guérisons, des réparations des maux physiques et psychiques des patients, malades, déséquilibrés, déstabilisés ou simplement décentrés.

C’est à travers l’écoute de mon livre audio du moment (« Clinical Applications of the Polyvagal Theory : The Emergence of Polyvagal-Informed Therapies » de Stephen W. Porges and Deb Dana) que j’ai découvert un poème qui a particulièrement résonné en moi.

La délicatesse brute et l’incisive humanité de ce texte nous rappelle combien il est important que la fonction n’érafle pas l’être, autant chez le soignant que chez le patient !

 

Par Foundry Co sur Pixabay

A travers ce texte, le soignant est invité à ne pas oublier, derrière sa technicité, que son patient est davantage qu’un simple objet de soin. Il est bel et bien un être unique doté d’une personnalité propre et riche. La narration du poème interpelle le soignant, créant ou recréant un dialogue qui ne peut souvent pas se dire, pas s’oser, pas même se penser parfois par des patients fragilisés, diminués, ô combien dépendants. Le risque est alors grand de ne pas être entendu, d’être incompris dans ces besoins profondément humains de chaleur, de regard, de contact, de compassion.

La théorie polyvagale nous informe et nous rappelle que l’intuition d’un bien-être physiologique dépendant d’un sentiment de sécurité et d’interaction sociale positive n’est pas qu’un mythe ou une chimère. Elle en fait une vérité tangible, mesurable, rassurante presque. Se sentir autorisé à échanger d’humain à humain, peu importe la hiérarchie, peu importe la souffrance ou la dépendance, permet de rester dans une zone de régulation, d’homéostasie, de confiance. Confiance en l’autre mais également confiance en soi ; cette dernière donnant souvent l’impression de quitter la barque lors d’annonce diagnostique engageante.  

 

Par Matheus Ferrero sur Unsplash

Si ce droit humain n’est pas respecté, n’est pas pensé par ceux qui soignent, ceux qui s’occupent de l’Autre, alors la sécurité se rétrécit, s’effrite, s’écroule parfois. L’interactivité laisse place à la réactivité. Le système neuronal pense devoir lutter pour sa survie et emploie les grands moyens : doit-il attaquer ? doit-il faire le mort ? doit-il fuir ?

Dans le doute, tel une guêpe prise au piège dans un bocal, il tentera toutes les options qui s’offrent à lui. Du moins, tant qu’on ne lui dira pas où est la sortie : où est l’humain ? où est l’empathie ? où est la compassion ? où est la chaleur ? Autant de directions vers lesquelles il pourra alors se diriger plus facilement bien que progressivement.

Cela demande alors de la patience à ce soignant souvent fatigué mais pourtant responsable de ses choix de carrière et de ses choix d’exercice. Cela demandera aussi du courage à ce patient vulnérable pour oser demander, interpeller, attirer ce soignant débordé et réclamer, si ce n’est exiger son dû de réassurance, d’humanité, d’Amour.

Par Dan Meyers sur Unsplash

 

Par Dan Meyers sur Unsplash

Le titre de ce poème se révèle alors à la fois percutant, inspirant et interpellant : « Permission inutile ». Peut-être est-ce là l’exception au besoin viscéral de consentement. Quand cette compassion, cette humanité est juste, adaptée, nourrissante et réparatrice, les êtres pourraient se passer d’autorisation, de permission, de consentement. Ces élans humains sont inscrits dans nos gènes, dans nos cerveaux, dans nos neurones : l’interaction sociale et la sécurité affective est un droit, non un devoir. Le droit s’incarne, le devoir s’agit. Mais il revient à chacun de nous d’œuvrer à incarner ce droit autant pour soi que pour ceux que nous côtoierons.

Bien trop de thérapeutes (corps médical et para médical) craignent de se laisser contaminer par les affects douloureux du patient qu’ils sont pourtant censés porter dans leur souffrance. Comment faire pour ne pas être éclaboussé tout en étant présent ? Mais la question n’est alors pas la bonne.

Il vaudrait mieux se demander : Comment faire pour rester avec l’Autre et ses éclaboussures ? Comment l’aider à nettoyer ça ensemble ? Comment lui montrer que ce n’est pas grave si des larmes tâchent ma blouse ? Et comment trouver mon pressing personnel pour prendre soin de moi, autant que je prends soin de l’Autre ?

Alors, les éclaboussures ne semblent plus si effrayantes que ça, plus si salissantes. Elles en deviennent même enrichissantes parfois. Elles donnent un sens à ce que l’on fait et permettent de comprendre pourquoi l’on fait ce que l’on fait. La technique s’orne de chaleur et l’humain reprend alors la place qui lui a toujours été destiné.

 

Par James Chan sur Pixabay

Dans un souci de transparence, j’aimerais vous partager la version anglaise du poème que j’ai retranscris à l’oreille (il est possible que de petites erreurs si nichent…) et également, la version française que j’ai traduite en essayant d’en conserver l’essence, même si la traduction n’est volontairement pas littérale, du moins pas systématiquement.

En français

Accompagne-moi
Toi, soignant de qui je dépends
S’il te plait, vois la personne assise ici, pas juste la blessure à soigner
S’il te plait, concentre-toi moins sur les tâches et les tests et plus sur comment je me sens
Cela soutient vraiment de savoir ta préoccupation authentique
Et savoir que c’est peut-être le cas, et parfois se demander quand tu vas et viens et fais ton travail
Mais sans chaleur dans la terre du soin
Et n'oublie pas que ça m’ampute profondément et que ça sape ma grâce
Quand tu conseilles et condescends et ne respecte pas mon espace
J'aurais vraiment aimé t’apercevoir toi, le vrai toi
Celui qui peut se laisser toucher par la douleur et partager quelques idées aussi
Je souhaiterais vraiment que tu remarques tout ce que je laisse ouvert
J'adorerais en parler, si j'étais installé en toute sécurité
Tu dois savoir que m'aider demande plus que de la technique
Il faut faire preuve de compétence et être à l'écoute de ma volonté
Car je suis celui qui vit avec des défis et des risques
J'ai besoin de compréhension, pas d'interventions brutales
Je suis tellement vulnérable, j'ai besoin de trouver ma foulée
Si tu voulais marcher avec moi, nous pourrions marcher tous les deux avec fierté

Permission inutile

En anglais

Accompany me
The efficient skill for learned one on whom I must depend
Please see the person seating here, not just a wound to mend
Please focus less on tests and tasks and more on how I feel
It really gives a lift to know that your concern is real
And know it maybe that it is, and sometimes wonder when, you come and go and do your work
But no warmth in caring land
And don’t forget it cuts me deep and undermine my grace
When you advice and condescend and don’t respect my space
I’d really liked to see a glance of you, the real you
The one who can relate to pain and share some insight too
I really wish you’d notice all the thing I leave on set
I’d love to talk about them, if I was safely laid
You need to know that helping me takes more than concrete skill 
You need to show some competence and listening to my will
For I’m the one whose living with challenges and risks
I need some understanding, not interventions brisk
I am so very vulnerable, I need to find my stride
If you would walk along with me, we both can walk with pride

Useless permission
Carole Scott Barth 

Bonjour !
Ravi de vous rencontrer.

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Cet article a 2 commentaires

  1. Caroline

    Merci pour votre partage de ce très beau texte et vos réflexions sur la bienveillance, l’écoute, l’accompagnement et l’amour universel qui permettent aux patients « ces êtres humains avant tout » et aux soignants de travailler ensemble pour tracer un chemin de vie apaisée vers l’avenir.
    Caroline

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