Le processus de guérison est encore entouré de beaucoup de mystère, malgré les avancées de la science et de la médecine allopathique. Il apparait néanmoins de plus en plus que la relation, la connexion et la chaleur humaine ne serait pas si indissociable des pronostics, des guérisons, des réparations des maux physiques et psychiques des patients, malades, déséquilibrés, déstabilisés ou simplement décentrés.
C’est à travers l’écoute de mon livre audio du moment (« Clinical Applications of the Polyvagal Theory : The Emergence of Polyvagal-Informed Therapies » de Stephen W. Porges and Deb Dana) que j’ai découvert un poème qui a particulièrement résonné en moi.
Le processus de guérison est encore entouré de beaucoup de mystère, malgré les avancées de la science et de la médecine allopathique. Il apparait néanmoins de plus en plus que la relation, la connexion et la chaleur humaine ne serait pas si indissociable des pronostics, des guérisons, des réparations des maux physiques et psychiques des patients, malades, déséquilibrés, déstabilisés ou simplement décentrés.
C’est à travers l’écoute de mon livre audio du moment (« Clinical Applications of the Polyvagal Theory : The Emergence of Polyvagal-Informed Therapies » de Stephen W. Porges and Deb Dana) que j’ai découvert un poème qui a particulièrement résonné en moi.
La délicatesse brute et l’incisive humanité de ce texte nous rappelle combien il est important que la fonction n’érafle pas l’être, autant chez le soignant que chez le patient !

A travers ce texte, le soignant est invité à ne pas oublier, derrière sa technicité, que son patient est davantage qu’un simple objet de soin. Il est bel et bien un être unique doté d’une personnalité propre et riche. La narration du poème interpelle le soignant, créant ou recréant un dialogue qui ne peut souvent pas se dire, pas s’oser, pas même se penser parfois par des patients fragilisés, diminués, ô combien dépendants. Le risque est alors grand de ne pas être entendu, d’être incompris dans ces besoins profondément humains de chaleur, de regard, de contact, de compassion.
La théorie polyvagale nous informe et nous rappelle que l’intuition d’un bien-être physiologique dépendant d’un sentiment de sécurité et d’interaction sociale positive n’est pas qu’un mythe ou une chimère. Elle en fait une vérité tangible, mesurable, rassurante presque. Se sentir autorisé à échanger d’humain à humain, peu importe la hiérarchie, peu importe la souffrance ou la dépendance, permet de rester dans une zone de régulation, d’homéostasie, de confiance. Confiance en l’autre mais également confiance en soi ; cette dernière donnant souvent l’impression de quitter la barque lors d’annonce diagnostique engageante.

Si ce droit humain n’est pas respecté, n’est pas pensé par ceux qui soignent, ceux qui s’occupent de l’Autre, alors la sécurité se rétrécit, s’effrite, s’écroule parfois. L’interactivité laisse place à la réactivité. Le système neuronal pense devoir lutter pour sa survie et emploie les grands moyens : doit-il attaquer ? doit-il faire le mort ? doit-il fuir ?
Dans le doute, tel une guêpe prise au piège dans un bocal, il tentera toutes les options qui s’offrent à lui. Du moins, tant qu’on ne lui dira pas où est la sortie : où est l’humain ? où est l’empathie ? où est la compassion ? où est la chaleur ? Autant de directions vers lesquelles il pourra alors se diriger plus facilement bien que progressivement.
Cela demande alors de la patience à ce soignant souvent fatigué mais pourtant responsable de ses choix de carrière et de ses choix d’exercice. Cela demandera aussi du courage à ce patient vulnérable pour oser demander, interpeller, attirer ce soignant débordé et réclamer, si ce n’est exiger son dû de réassurance, d’humanité, d’Amour.

Le titre de ce poème se révèle alors à la fois percutant, inspirant et interpellant : « Permission inutile ». Peut-être est-ce là l’exception au besoin viscéral de consentement. Quand cette compassion, cette humanité est juste, adaptée, nourrissante et réparatrice, les êtres pourraient se passer d’autorisation, de permission, de consentement. Ces élans humains sont inscrits dans nos gènes, dans nos cerveaux, dans nos neurones : l’interaction sociale et la sécurité affective est un droit, non un devoir. Le droit s’incarne, le devoir s’agit. Mais il revient à chacun de nous d’œuvrer à incarner ce droit autant pour soi que pour ceux que nous côtoierons.
Bien trop de thérapeutes (corps médical et para médical) craignent de se laisser contaminer par les affects douloureux du patient qu’ils sont pourtant censés porter dans leur souffrance. Comment faire pour ne pas être éclaboussé tout en étant présent ? Mais la question n’est alors pas la bonne.
Il vaudrait mieux se demander : Comment faire pour rester avec l’Autre et ses éclaboussures ? Comment l’aider à nettoyer ça ensemble ? Comment lui montrer que ce n’est pas grave si des larmes tâchent ma blouse ? Et comment trouver mon pressing personnel pour prendre soin de moi, autant que je prends soin de l’Autre ?
Alors, les éclaboussures ne semblent plus si effrayantes que ça, plus si salissantes. Elles en deviennent même enrichissantes parfois. Elles donnent un sens à ce que l’on fait et permettent de comprendre pourquoi l’on fait ce que l’on fait. La technique s’orne de chaleur et l’humain reprend alors la place qui lui a toujours été destiné.

Dans un souci de transparence, j’aimerais vous partager la version anglaise du poème que j’ai retranscris à l’oreille (il est possible que de petites erreurs si nichent…) et également, la version française que j’ai traduite en essayant d’en conserver l’essence, même si la traduction n’est volontairement pas littérale, du moins pas systématiquement.
En français
Accompagne-moi Toi, soignant de qui je dépends S’il te plait, vois la personne assise ici, pas juste la blessure à soigner S’il te plait, concentre-toi moins sur les tâches et les tests et plus sur comment je me sens Cela soutient vraiment de savoir ta préoccupation authentique Et savoir que c’est peut-être le cas, et parfois se demander quand tu vas et viens et fais ton travail Mais sans chaleur dans la terre du soin Et n'oublie pas que ça m’ampute profondément et que ça sape ma grâce Quand tu conseilles et condescends et ne respecte pas mon espace J'aurais vraiment aimé t’apercevoir toi, le vrai toi Celui qui peut se laisser toucher par la douleur et partager quelques idées aussi Je souhaiterais vraiment que tu remarques tout ce que je laisse ouvert J'adorerais en parler, si j'étais installé en toute sécurité Tu dois savoir que m'aider demande plus que de la technique Il faut faire preuve de compétence et être à l'écoute de ma volonté Car je suis celui qui vit avec des défis et des risques J'ai besoin de compréhension, pas d'interventions brutales Je suis tellement vulnérable, j'ai besoin de trouver ma foulée Si tu voulais marcher avec moi, nous pourrions marcher tous les deux avec fierté Permission inutile
En anglais
Accompany me The efficient skill for learned one on whom I must depend Please see the person seating here, not just a wound to mend Please focus less on tests and tasks and more on how I feel It really gives a lift to know that your concern is real And know it maybe that it is, and sometimes wonder when, you come and go and do your work But no warmth in caring land And don’t forget it cuts me deep and undermine my grace When you advice and condescend and don’t respect my space I’d really liked to see a glance of you, the real you The one who can relate to pain and share some insight too I really wish you’d notice all the thing I leave on set I’d love to talk about them, if I was safely laid You need to know that helping me takes more than concrete skill You need to show some competence and listening to my will For I’m the one whose living with challenges and risks I need some understanding, not interventions brisk I am so very vulnerable, I need to find my stride If you would walk along with me, we both can walk with pride Useless permission Carole Scott Barth
Merci pour votre partage de ce très beau texte et vos réflexions sur la bienveillance, l’écoute, l’accompagnement et l’amour universel qui permettent aux patients « ces êtres humains avant tout » et aux soignants de travailler ensemble pour tracer un chemin de vie apaisée vers l’avenir.
Caroline
Merci beaucoup pour ce retour !